Design Thinking et UX Design : une frontière étroite
Quelle différence entre l’UX Design et le Design Thinking ? Comment les définir ? Quelle relation étroite existe entre ces deux disciplines ? Autant de questions auxquelles Vincent Dromer, co-fondateur de Klap.io, une agence ayant pour vocation de partager et former à la méthodologie du design thinking, et François Chaillot, UX Designer depuis 7 ans, ont tenté de répondre durant cet échange.
La définition de l’UX Design
L’UX Design, UX pour User eXperience, en français l’expérience utilisateur, est un terme inventé par Don Norman, un professeur, psychologue et cognitiviste américain. Ce dernier trouvait que les termes IHM (Interactions Homme-Machine) et l’utilisabilité étaient trop limités et restrictifs. Il a ainsi souhaité couvrir un champ plus large sur l’expérience avec la personne, sa relation et les interactions physiques et manuelles qu’elle peut avoir avec un système, une interface et le design.
Ainsi, l’UX Designer est celui qui va concevoir l’expérience utilisateur afin de favoriser l’usage mais aussi fidéliser l’audience. La discipline de l’UX Design n’est pas seulement réservée aux sites web et applications. Ses méthodes, comme les ateliers d’idéation ou encore les phases de recherche, peuvent très bien s’appliquer et intervenir dans de nombreux autres domaines.
François Chaillot cite l’exemple des EHPAD (Établissement d’Hébergement pour Personnes gées Dépendantes), un sujet d’actualité notamment à cause de la pandémie de Coronavirus-19, période pendant laquelle les résidents/patients et leurs familles ne pouvaient se voir que pendant quelques minutes, derrière une cloison en plexiglass, qu’une seule fois par semaine. L’UX peut très bien intervenir avec pour but l’amélioration de l’organisation de ces structures et la facilitation des visites en période de crise.
Toujours en sortant du contexte de l’IHM, Vincent Dromer travaille de son côté en collaboration avec l’Hôpital Américain de Paris afin d’améliorer et faciliter les parcours des patients et ceux des soignants, en somme améliorer l’expérience des patients au global pendant leurs séjours à l’hôpital. On constate ainsi toute la force de la discipline.
L’UX Design, c’est l’expérience humaine avant tout.
François Chaillot
Les différentes étapes de l’UX Design

01. Phase de l’exploration
Cette étape a pour but de comprendre les besoins et usages des utilisateurs. Par le biais de différentes méthodes, comme les focus group et les interviews, on va recueillir des informations qualitatives en vue de recueillir du verbatim afin de déceler des opportunités intéressantes mais aussi afin de créer des profils types utilisateurs appelés “personas”.
02. Phase de l’idéation
Comme son nom l’indique, en se basant sur les informations préalablement recueillies durant la phase d’exploration, il s’agit de produire des idées, émettre des hypothèses et trouver des solutions pour répondre au mieux au besoin utilisateur.
03. Phase de conception
Aussi appelée phase de génération, le but de cette étape est de produire des représentations physiques (wireframes, maquettes, prototypes…) des solutions envisageables.
04. Phase de l’évaluation
Les solutions produites vont pouvoir êtres testées auprès des utilisateurs et ainsi être validées ou non : c’est ce qu’on appelle les tests utilisateurs. Cette étape permet aussi de récolter des feedbacks afin d’améliorer les travaux réalisés.
Ce processus systémique peut être adapté selon les besoins du client.
Les phases de recherche, de compréhension et de récolte des besoins utilisateurs occupe une place importante. Il va y avoir également un travail très important au niveau de l’ergonomie, de l’évaluation et de la validation des hypothèses émises lors de l’étape d’idéation par le biais de différents moyens (SUS, tests utilisateurs, attrakdiff…)
C’est en cela que l’UX Research et l’UX Design sont étroitement liés : l’UX Research va se concentrer sur les tests utilisateurs tandis que l’UX Designer va pouvoir animer les ateliers, donc endosser le rôle de facilitateur, mais aussi matérialiser les hypothèses d’un point de vue ergonomique grâce aux wireframes.
Le Design Thinking, c’est quoi ?
Le Design Thinking est une discipline antérieure à l’UX Design. Elle a été élaborée dans les années 80 par le designer Rolf Faste à l’université Stanford aux États-Unis. Cette méthode innovante qui s’appuie principalement sur des ateliers de co-créativité et implique les retours des utilisateurs finaux. Le Design Thinking peut plus facilement concerner différents profils de non-designers comme les chefs de projet ou les managers.
Même si les différentes étapes du Design Thinking font appel au bon sens, il est vrai qu’elles permettent de bien structurer les différentes phases d’un projet, de tout mettre à plat et surtout pouvoir prendre du recul. Ces étapes sont modulables et s’entrecroisent pour s’adapter au mieux aux besoins du client et de l’utilisateur. Par exemple, il est possible de prévoir des tests utilisateurs en amont et pas forcément à la fin, cela dépend du sujet du projet.

Phase 1 : comprendre et définir
Le Design Thinking est une méthodologie de bon sens qui nécessite avant tout la bonne compréhension de l’environnement pour l’utilisateur dès le début du projet. Il s’agit dans un premier temps de bien comprendre l’utilisateur et ses attentes. Il est intéressant également, au sein d’une entreprise, d’identifier au préalable les ressources et les compétences disponibles puis de faire le parallèle avec le projet, afin de s’assurer que l’entreprise est capable, apte à digérer et surtout à produire des travaux pour le bon déroulement du projet.
Phase 2 : l’idéation
Vient ensuite la phase d’idéation, selon Vincent Dromer, c’est la phase la plus visible de la discipline. Elle est réalisée par le biais d’ateliers de co-création durant lesquels différents profils (utilisateurs, collaborateurs, experts…) se retrouvent et échangent leurs idées dans le but de trouver des solutions par rapport aux notions et problématiques qui ont été identifiées durant la phase en amont, c’est-à-dire durant l’analyse utilisateurs. L’objectif est que n’importe quelle personne du groupe puisse se sentir designer et participer activement à la production d’idées.
Phases 3 et 4 : prototypes et tests
Les prototypes permettent de générer des solutions physiques et testables. En Design Thinking, on va pouvoir jongler entre les prototypes et les tests utilisateurs. Ces itérations vont rendre les choses concrètes et vont permettre de collecter les feedbacks des utilisateurs et de l’entreprise. Ces deux phases vont permettre de confirmer ou infirmer les hypothèses émises en amont et d’avancer dans la bonne direction dans cette étape de conception.
Le Design Thinking, pour avancer plus vite et stimuler les collaborateurs
Le Design Thinking est plus souple que son voisin l’UX. Cette discipline s’appuie principalement sur les échanges du groupe et les hypothèses qui peuvent être émises durant les ateliers, même si celles-ci n’avaient pas été forcément identifiées au préalable. Ce sont durant les ateliers que des opportunités intéressantes pour l’entreprise émergent. De son côté, l’UX Research est un peu plus limité car on va s’assurer que le projet suit le mapping global qui a été mis en place en amont.
Vincent Dromer fait un parallèle avec la loi des 20/80 (ou Pareto) : en Design Thinking, il s’agit d’utiliser 20% du temps qui aurait été pris pour faire une analyse globale de toute la partie “conception” pour atteindre 80% des livrables. En somme, il faut rapidement remplir l’objectif afin d’économiser son énergie et surtout ne pas hésiter à ré-ajuster les travaux et les affiner si besoin. Même si ce n’est pas la bonne direction qui a été prise au départ, il est toujours possible de tirer partie de ce qui a été fait et de l’optimiser au mieux pour se rapprocher du rendu final souhaité.
Chez Klap.io, Vincent Dromer et ses collaborateurs ne vont pas forcément aller chercher la bonne analyse utilisateurs en amont mais ils vont plutôt chercher à produire un prototype proche d’une solution finale, avec un très haut niveau de détails, et, par le biais des tests utilisateurs, vérifier que le produit correspond au besoin initial des utilisateurs. En effet, chez l’annonceur, il est souvent compliqué de prévoir une phase de recherche à cause de certains impératifs, comme le manque de temps ou de ressources. En produisant rapidement des travaux et grâce aux tests utilisateurs, il est toujours possible de continuer à optimiser ou enrichir ces derniers. Il s’agit de donner la parole aux utilisateurs.
Les méthodes du Design Thinking permettent aussi de stimuler moralement et socialement les collaborateurs d’une entreprise car ils se détachent de leur rythme de travail et de leurs missions habituelles pour échanger ensemble de façon ludique et amusante, pour se retrouver dans un autre contexte, et ainsi émettre des idées. Les collaborateurs se libèrent de nombreuses contraintes. Ils sont plus créatifs et inventifs.
Le Design Thinking, par le biais de ses ateliers, permet également de découvrir de nombreux leviers et de petit à petit, faire adopter une nouvelle démarche au sein de l’entreprise et des premiers réflexes beaucoup plus centrés sur l’utilisateur. Les méthodes du Design Thinking et ses outils de facilitation pourraient être repris comme exemple par les managers d’aujourd’hui afin de réussir à distribuer la parole ou encore aider un groupe à échanger et avancer autour d’un sujet. Ce sont les nouvelles manières de faire du leadership.
Conclusion
Design Thinking & UX Design : des disciplines qui se complètent
Selon Vincent Dromer, le Design Thinking va intervenir sur toutes les phases en amont, de conception du projet tandis que l’UX Design va plus concerner la phase de réalisation, il va permettre de concrétiser les idées et donc le projet.
Le Design Thinking répond à “Quoi faire ?” et l’UX Design à “Comment faire ?”
François Chaillot
Pour François Chaillot, L’UX Design comporte de grandes phases de recherche et de tests, et au milieu, intervient le Design Thinking avec des ateliers de co-création. Ce co-travail avec les différents métiers, collaborateurs et intervenants va permettre de mettre en lumière des solutions. Ainsi, l’UX Designer accompagne les différentes parties pour générer des idées et par la suite, une interface ergonomique la plus claire et efficiente possible.
Crédits :
Adeline Demarquois
SEO & Rédactrice Web
Apprentie UX Designer